Il y a deux mois, l'OM gagnait 4-0 sur la pelouse de Lorient. Une après-midi paisible. Et puis, sur un contre, Waris centre pour Moukandjo qui marque dans un but phocéen quasi vide. Yohann Pelé, qui se replaçait après avoir mal apprécié la trajectoire, ne prend même pas la peine de plonger. Il est même possible de penser sur le coup qu'il boude contre ses partenaires. Une attitude qui interpelle, alors que, quelques jours plus tôt, il n'était pas exempt de tout reproche sur l'ouverture du score de Monaco en coupe de France au Vélodrome (3-4 a.p). La cause était alors entendue : Pelé est gentil, c'est un gardien honnête de Ligue 1, mais malgré son gabarit, il n'est pas taillé pour l'OM, désolé. Le constat traîne depuis le début de saison et sa succession de Steve Mandanda, où il n'a pas démérité mais il a eu le tort de faire une faute de main contre Nice en septembre avant de s'encaisser plusieurs buts sur coups francs, notamment à... Monaco.
Yohann Pelé aurait pu crier au délit de sale gueule. S'épancher dans la presse pour commenter un peu plus souvent son record de clean sheet en Europe. Mais il a préféré bosser, répondre sur le terrain. Au mois d'avril, c'est Florian Thauvin qui sera élu Phocéen du mois, au lendemain de son triplé sur la pelouse de Caen. Mais sur les cinq matchs programmés dans ce mois, c'est le portier qui a été le plus régulier et de loin. C'est lui qui a permis à la maison phocéenne de ne pas prendre feu, à Lille, à Nancy, à Toulouse, qui a retardé l'échéance face à Dijon. Mais il en avait encore gardé sous la semelle. L'apothéose, c'est donc ce match à Bordeaux, où il a sorti trois parades décisives. La première avec un arrêt de la tête (!) sur Kamano à bout portant, qui aurait alors pu faire le break. Le second encore face à l'ancien joueur de Bastia, alors que l'OM était revenu au score. Le plus savoureux intervient dans le temps additionnel, une parade spectaculaire sur une tentative d'Ounas. Même si Gomis a marqué, même si Thauvin a fait la passe, le héros de Bordeaux, celui qui permet à l'OM de garder la 5e place (sous réserve de finir le travail contre Bastia samedi), c'est Yohann Pelé.
Plus qu'une plaque commémorative, le portier va sûrement se voir proposer une prolongation pour reprendre son rôle de doublure. Ce qu'il semble prêt à accepter. Une chance pour l'Olympique de Marseille. Car oui, Yohann Pelé est une chance. Un joueur discret, pas d'ordinaire ce qui a la cote dans la ville phocéenne. Mais à défaut de jouer au taulier, son humilité est salvatrice dans le vestiaire. Il faut des Pelé pour contre-balancer avec l'exubérance de certains. Et surtout, c'est un bon joueur de foot, ce qu'il vient de prouver cette saison. Certes, son malheur est de tomber dans un club qui a connu de très grands gardiens. Dans l'histoire récente, il y avait Fabien Barthez, référence mondiale du poste à un moment, Steve Mandanda, élu quatre fois meilleur gardien de Ligue 1, ou encore Andreas Köpke, qui a débarqué à Marseille auréolé d'un titre de champion d'Europe avec la Mannschaft. Mais après ? Pelé était peut-être moins spectaculaire que Porato mais il a été bien plus régulier au final. Même réflexion concernant Cédric Carrasso, qui n'avait pas encore un niveau international quand il gardait les cages du Vélodrome. Et que dire de Vedran Runje ? Du Croate, on se souvient aujourd'hui volontiers de l'attitude rebelle. Mais a-t-il vraiment ramené autant de points que Pelé à l'OM ? Une chose est sûre : sur le bilan de l'Albatros cette saison, la prestation à Bordeaux balaiera tout le reste.