Après l'ambiance houleuse lors de la réception de Rennes, il y a trois semaines, Vincent Labrune s'était arrêté face à la caméra de Canal+ pour faire part de son agacement. Alors qu'il est question d'une possible reprise du club, certains débordements, que l'on avait plus vus depuis longtemps, refont surface. Contre Bordeaux, le président de l'OM peut se laisser aller à deux constats, deux extrêmes : soit le complot qui vise son action est sacrément bien organisé et puissant, soit la colère des supporters n'est finalement que le résultat d'un enchaînement de prestations indigestes fournies par une équipe qui n'incarne en rien les valeurs olympiennes. À la fin de la rencontre, Vincent Labrune n'aurait pas eu le temps de se poser la question. Ce serait son apparition furtive aux vitres dans un salon du Vélodrome qui aurait provoqué un mouvement de foule juste après le coup de sifflet final, avec 500 supporters qui se sont rués sur les portes d'entrée pour venir lui dire en face tout le bien qu'ils pensent de son bilan à la tête du club. Une foule véhémente qui a été dispersée par les forces de l'ordre à l'aide de chiens et de fumigènes. Dès le coup de sifflet final, de nombreux supporters dans les deux virages sont descendus en bas des tribunes pour défier les forces de l'ordre, et faire peser la menace d'un envahissement du terrain.
Bloqués un long moment dans le vestiaire, les joueurs, qui ont eu le temps de commenter les nombreuses banderoles déployées pendant le match, sont sortis tous ensemble pour rentrer dans un bus banalisé afin de quitter l'enceinte sous escorte policière. Un climat pesant, qui n'est pas sans rappeler le début des années 2000, lorsque par exemple Stéphane Dalmat était obligé de quitter le Vélodrome allongé dans le couloir du bus de son ancien club, le Racing Club de Lens, alors que les supporters l'attendaient à la sortie. À l'époque aussi, l'OM, qui visait le podium en début de saison, s'était résolu à jouer le maintien. Si dans une Ligue 1 bien faible à vingt clubs cela ne devrait pas cette fois-ci se jouer à un but de Bakayoko à la dernière journée, la situation de crise pourrait se poursuivre. Pour calmer les ardeurs et donner un os à ronger aux journalistes présents, Basile Boli est passé en zone mixte. L'ambassadeur du club a donné son sentiment, tirant sur Michel et sur sa composition d'équipe. Pour l'ancien défenseur, la crise olympienne ne dépasse pas le cadre du sportif. Un décalage aussi grand que celui de l'entraîneur espagnol, en conférence de presse, qui a trouvé son équipe meilleure et qui se focalise immédiatement sur le prochain match, qu'il espère gagner.
À ce niveau-là, ce n'est plus de l'aveuglement, c'est tout simplement de la provocation. Et ce n'est pas fini. Comme son équipe est capable de jouer dix heures d'affilée sans marquer, Michel peut enchaîner les conférences de presse en assurant voir du positif tout en évitant toute forme de lucidité, qui consisterait à s'excuser et à retourner de l'autre côté des Pyrénées au plus vite. Comme le prochain match ne se disputera que dans sept jours, les feuilletons médiatiques sont à prévoir. Probablement pour nous expliquer que Vincent Labrune fait son possible pour sortir l'OM de cette mauvaise passe, mais qu'il est pieds et poings liés, à la merci d'une Margarita Louis-Dreyfus qui lui a administré un Igor Levin en guise de bourreau. Si ça ne suffit pas, il y aura aussi des mises en scène et autres subterfuges pour détourner l'attention : à Bastia, il y avait l'épisode du jet privé pour Zurich et du véhicule utilitaire aux vitres teintées, livré à toutes les caméras. Contre Bordeaux, c'est une coupure d'électricité qui est survenue dans le virage sud, au plus fort de la contestation des South Winners. Le hasard sans doute. Mais une chose est sûre. Quoi qu'il arrive, les supporters ne lâcheront pas. Tant qu'il n'y aura pas de changements significatifs, la gronde sera encore là, toujours plus forte. Parce que ce qui caractérise avant tout ce club, c'est l'amour de ses fidèles, et qu'ils ne le laisseront pas se mourir de la sorte sans rien dire.