Alors certes, l'opposition n'était pas bien épaisse. Mathieu Peybernes a tout du nouveau Daniel Congré, soit ce défenseur sympathique de bas de tableau de Ligue 1 qui donne à chaque fois un but à l'OM par un mauvais placement ou un marquage élastique, quand ce n'est pas tout simplement un csc. Mais dans les faits, si le joueur formé à Sochaux passe tant pour une victime après ce Lorient-OM (1-4), c'est qu'il avait en face de lui un sacré client. En décembre dernier, le même Peybernes avait affronté l'OM avec Bastia à Furiani, et il n'avait pas été autant ridicule. Mais là, sur le troisième but, Florian Thauvin lui fait la misère. Feinte puis frappe avec son pied gauche, et une accélération fatale entre les deux. Le pauvre central lorientais est encore trop court quelques minutes plus tard sur la quatrième réalisation de Sanson, mais le centre de Thauvin était parfait, fort comme il fallait. Le geste juste après une percée sur son aile droite alors que les deux premiers buts sont venus de ses corners, que Rudi Garcia lui avait demandé de tirer dans cette zone du terrain. En à peine plus d'une heure de jeu passée sur la pelouse du Moustoir, Florian Thauvin s'est donc bien refait la cerise.
Il est même désormais en bonne position pour finir sa meilleure saison olympienne avec un "double-double" (10 buts et 10 passes décisives sur l'exercice). Une performance que seuls six joueurs ont réussi à faire lors des dix dernières saisons de Ligue 1, preuve que ce n'est pas à la portée de n'importe qui. La qualité du cercle des lauréats n'est d'ailleurs pas de nature à être remise en cause : Zlatan Ibrahimovic à deux reprises (2016 et 2014), Angel Di Maria (2016), Dimitri Payet (2013), Eden Hazard (2012), Nêne (2012) et Gervinho (2011). Forcément, dans l'euphorie, Thauvin peut compter sur son fan club, qui n'hésite pas après son match face à la lanterne rouge à demander à Didier Deschamps un strapontin pour le milieu offensif en équipe de France, alors que Thomas Lemar, Ousmane Dembélé et Kingsley Coman sont en concurrence à son poste. Du coup, pour se rafraîchir, il y a un contre-argument tout trouvé : c'était contre Lorient. Thauvin, l'homme qui mérite d'être comparé à Robben pour ses buts contre Lille, Nancy ou Rennes n'aurait plus rien du batave dans les gros matchs. Son année 2017 est là pour appuyer dans ce sens. Son mois de janvier a été plus compliqué, quand il a fallu jouer Lyon et Monaco, et il n'a pas été plus à la fête la semaine dernière quand le PSG et Monaco se sont présentés au Vélodrome. Alors Thauvin, bon que contre les petits ?
Pourtant, quand on regarde de plus près le parcours du joueur de 24 ans sous le maillot olympien, il n'est pas compliqué de retrouver la trace du match à Naples en Ligue des champions, où il sonne seul la révolte, de ses buts cette année-là contre Lyon, à Gerland ou au Vélodrome, de son entrée décisive avec Bielsa en relayeur contre Monaco ou encore de son but l'an dernier en finale de la Coupe de France face au PSG, une égalisation qui ne doit rien à personne. Forcément, Thauvin, qui se doit de faire des différences individuelles, a plus de chances d'exister face à Peybernes que face à Marquinhos. Mais il n'en reste pas moins tributaire du jeu de ses coéquipiers. Contre Lorient, il brille aussi sur les deux derniers buts car en amont dans la construction des actions, Rémy Cabella a joué en première intention. Est-ce que cela a toujours été le cas par le passé ? Autre paramètre à prendre en compte, le mental. En janvier, il n'y avait pas forcément de nuages à l'horizon du jeune milieu offensif. Mais le simple fait de voir les journalistes lui poser des questions sur son rendement en baisse a contribué à le faire douter. Il faut se dire que si ça marche dans un sens, cela doit aussi marcher dans l'autre. Et pour confirmer son match à Lorient, Thauvin a un programme plutôt sympathique avec Angers et Lille. Et après, l'équipe de France jouera contre le Luxembourg...