Tout ça pour ça ? C'est certainement la réaction unanime et consternée des supporters et observateurs de l'OM suite au communiqué nocturne de Margarita Louis-Dreyfus mardi soir. Il faut dire que la réunion après le revers à Bastia, nécessitant tout de même l'affrètement d'un jet privé en pleine nuit, laissait augurer autre chose qu'un statu quo. Déjà, dans l'esprit de tous, le cas Michel était forcément réglé. En dépit du coût de son licenciement, on voyait mal comment l'Espagnol allait pouvoir s'en sortir autrement que par un aller simple pour Madrid. Raté ! "Je suis rassurée par le professionnalisme et la volonté de Michel de mener à bien cette fin de saison, avec toute sa force et son énergie, assure l'actionnaire principale. Je suis convaincue qu’avec ses qualités de compétiteur au plus haut niveau et sa grande expérience, il va permettre aux joueurs de s'exprimer pleinement sur le terrain sans peur ni stress afin de finir honorablement ce championnat et, pourquoi pas, remporter la coupe de France". De notre côté, si nous ne sommes toujours pas rassurés sur la compétence du technicien, nous découvrons un sens de l'humour que nous ne connaissions pas chez Margarita Louis-Dreyfus.
Une fois la consternation passée, reste à savoir quelles sont les interprétations possibles de cet exercice de style. Certains y voient une sorte d'union sacrée en constatant l'absence de victimes. Curieuse analyse, tout de même, car au contraire de Michel, Vincent Labrune n'est pas cité, si ce n'est pour sa participation à ladite réunion. C'est d'ailleurs ce que pensait La Provence mercredi matin. Pour le quotidien régional, "Labrune a perdu le pouvoir". Comme nous le pensons également, le fait de maintenir Michel dans ses fonctions démontre, en tout cas, que le président marseillais n'a plus la main, lui qui ne cesse de laisser fuiter son envie de limoger son entraîneur.
C'est d'ailleurs ce que nous confie un ancien président du club : "Une idylle de cinq ans se termine. Les enchaînements de catastrophes observés depuis deux saisons semblent avoir enfin ouvert les yeux de MLD, peut-être sous l'impulsion de ses conseillers. Je pense sincèrement qu'elle a raison de ne rien toucher jusqu'à la fin de la saison, car changer d'entraîneur si on n'a pas de bonne solution de rechange ne sert à rien. En revanche, Vincent Labrune n'a plus la main. À vouloir tout faire, il a fait exploser son jouet et, aujourd'hui, le club est en lambeaux". Même son de cloche chez un autre ex-dirigeant : "C'est une navigation à vue, clairement, mais il y a surtout un désaveu flagrant du président. Elle vante les qualités sur plusieurs lignes de celui dont il veut le départ, et elle ne le cite pas une seule fois. La question ne se pose même pas, c'est un désaveu cinglant. Auparavant, lorsqu'elle publiait un communiqué, c'était toujours pour le défendre, alors qu'aujourd'hui, elle cite 'le management'. J'imagine que dans les heures ou les jours qui viennent, Vincent Labrune va oeuvrer pour corriger cela et obtenir un nouveau communiqué, mais le mal est fait."
Alors, si Michel est assuré de terminer la saison, en sera-t-il de même pour son président ? C'est probable, car pour l'instant, comme nous l'explique ce même ex-dirigeant, le club avance sans phares : "Son mari avait, à l'époque, toujours une solution de rechange, et si elle en avait une sous la main, elle l'aurait jouée, c'est sûr et certain. Mais aujourd'hui, elle n'a personne vers qui se tourner". Mathieu Grégoire, correspondant de L'Equipe à Marseille, exclut lui aussi un départ anticipé du président, à la différence près que, pour lui, Margarita Louis-Dreyfus risque de se mettre dans une position inconfortable : "C'est un pari un peu risqué, car en isolant Labrune et en gardant Michel, illégitime pour l'immense majorité des fans, elle peut devenir la personne la plus ciblée par les supporters".
Des supporters qui, justement, rencontreront les joueurs ce jeudi et réfléchissent à la nature des actions de protestation à mener dimanche pour OM-Bordeaux. Un sujet qui préoccupe le journaliste de Canal Plus, Pierre Ménès, plus que l'avenir de Labrune ou Michel : "Elle a refusé de faire sauter le fusible et met son président en première ligne, avant de les dégager tous les deux en fin de saison. Mais, malheureusement, c'est au mépris de la sécurité en ville, au stade et pour les joueurs. Il ne manquerait plus qu'il y ait des incidents et que l'OM soit sanctionné. Personnellement, je suis de l'avis de ceux qui veulent boycotter le stade : tu n'es pas d'accord, tu ne vas pas au match". Un souhait peut-être partagé par les dirigeants olympiens, vraisemblablement pétrifiés par la perspective d'affronter Bordeaux sous des tombereaux d'injures et de sifflets. On le serait à moins...