André-Pierre Gignac vient de franchir la barre des 100 buts en Ligue 1. Au passage, il faut également tomber la barre des 20 buts pour un joueur de l'OM sur une saison en championnat, qui datait d'Alen Boksic il y a plus de 20 ans. De quoi lancer un dernier débat sur l'attaquant phocéen, à quelques semaines de la fin de son aventure avec son club de coeur : en cinq ans, Gignac est-il rentré dans la grande légende des attaquants olympiens ?
Oui, on se souviendra des années Gignac
André-Pierre Gignac a donc passé la barre symbolique des 100 buts en championnat. Dans la longue histoire française, il reste bien loin des Delio Onnis, Bernard Lacombe et autre Josip Sklobar. Mais il faut comparer ce qui est comparable. Gignac n'a pas marqué ses buts en Division 1, où l'on pouvait rencontrer des équipes bien favouilles. Lui a dû se faire les dents sur la fameuse "Liguain", celle des 0-0 du dimanche soir et des entraîneurs qui veulent avant tout bien rester en place. Si l'on se concentre sur les années 2000, seuls quatre attaquants ont franchi cette barre malgré des centaines de candidats : Gignac donc, mais aussi Pedro Pauleta (141), Bafétimbi Gomis (102) et Mamadou Niang (100). Alors qu'il lui reste trois matchs pour améliorer son score, APG en est à 58 buts avec le maillot blanc en Ligue 1, 76 toutes compétitions confondues. Un joli score qui permet au natif de Fos/Mer de devancer Tony Cascarino, Joseph Bonnel ou Roger Scotti. Même si ces deux premières saisons n'ont pas répondu aux attentes, on se souviendra des "années Gignac". Des fois où il a fait trembler les filets avec des frappes soudaines et puissantes. Car contrairement à Papin, qui pouvait se régaler des caviars de Waddle, le numéro 9 olympien est souvent allé seul se chercher ses réalisations. Au passage, sur ses 100 buts en Ligue 1, il n'y a que 4 penalties. Même lors de sa pire saison, alors que ses relations avec Deschamps étaient glaciales, il s'était débrouillé pour mettre un pion splendide contre Lens en coupe de la Ligue, le dernier trophée en date glané par l'OM. Et lorsqu'il fallait jouer le PSG de Zlatan, il ne s'est pas démonté pour mettre deux doublés qui ont donné aux supporters olympiens l'envie de croire à l'impossible. Le seul tort de Gignac, finalement, c'est son époque. Durant ses cinq années à l'OM, il n'a eu cesse de se voir rabâcher son salaire et son comportement. Mais, pour poursuivre le parallèle avec Papin, JPP avait aussi un sacré caractère, sur et en dehors des terrains, ainsi qu'une des meilleures fiches de paie du vestiaire. Mais à l'époque, les footballeurs n'étaient pas épiés à ce point.
Non, Gignac n'a pas marqué le club
Il ne faut pas confondre. Si Gignac a mis 100 buts en Ligue 1, il n'a pas mis 100 buts à l'OM. Dans le même laps de temps, Mamadou Niang avait réussi à faire les deux, marquant dans les autres compétitions autant de buts que ce qu'il avait déjà planté avec Strasbourg et Troyes. Car malgré des premiers mois difficiles, Niang a été régulier à l'OM, saison après saison. Gignac, lui, a mis bien deux ans avant de se mettre à planter toutes les semaines ou presque. Coïncidence ou non, c'est depuis qu'il s'est installé à la pointe de l'attaque phocéenne que le club n'a pas gagné de trophées. Elie Baup, José Anigo puis Marcelo Bielsa ont choisi d'en faire un titulaire indiscutable. Ce qui lui permet d'arriver à un tel score. Il y a quelques années, Rolland Courbis reconnaissait sans mal que sans son goût acharné du turn-over, Florian Maurice aurait pu lui aussi sans mal passer la barre des 20 buts en une saison. Installé, Gignac s'est mis à marquer contre les petites équipes. En coupe d'Europe, il n'a marqué que contre Limassol, Eskisehirspor et Zilina. Rien contre Chelsea, Manchester United, Arsenal, Naples, Dortmund ou encore le Spartak Moscou et Fenerbahçe. En Ligue 1, pareil ou presque, hormis ces deux doublés contre Paris (pour un nul et une défaite à l'arrivée), aucun but contre des équipes du top3 du championnat. À une autre époque, Gignac aurait été écarté fissa avec un tel bilan dès le début de son aventure. Mais il a pour lui d'être tombé à l'OM avec une direction qui l'a gentiment laissé aller au bout de son contrat. Parce qu'il avait un gros salaire, parce que 18 millions d'euros ont été investis sur lui au départ, il a pu rester et écrire son histoire à la force du poignet. Avec toutes les compétitions que joue l'OM de nos jours, pas dur de monter dans le classement des buteurs. Brandao en a d'ailleur inscrit autant que Roger Magnusson. Mais en prenant en compte le ratio but/match, Gignac est plutôt à côté de ce bon vieux Philippe Vercruysse. Ce qui est bien, mais pas top. Chaque chose à son place.