"Si Diarra a été clair et pro dans sa démarche, il n'a pas donné plus que les 100%, comme les supporters l'espèrent toujours à Marseille. Drogba a multiplié les déclarations d'amour en public, ce qui a pu agacer, mais il acceptait de jouer sous infiltration. Lass n'a grosso modo joué qu'un match sur deux avec l'OM en 2016. On ne fait pas de demie-statue". Voici ce que l'on pouvait trouver ici, au même emplacement, en conclusion d'un article qui s'intitulait "Lassana Diarra, merci, sans plus". De quoi donc peut-être étonner, un peu plus de trois mois plus tard, au moment d'affirmer que c'est une bonne chose qu'il enfile le brassard de capitaine pour l'ouverture de la saison 2016-2017. C'est qu'en trois mois, il s'est passé beaucoup de choses. La magie du football, pourrait-on dire. Ou la réalité du marché actuel, c'est selon.
Il y a trois mois donc, Diarra n'attend pas la fin du championnat pour dire qu'il y a de grandes chances pour qu'il ne soit plus à l'OM la saison suivante. Dès le dernier match à domicile, l'homme qui s'occupe de ses réseaux sociaux prend soin de bloquer les comptes liés au club pour éviter les commentaires désobligeants. Et juste après la finale de la coupe de France perdue contre le PSG (4-2), il accorde un entretien à L'Equipe 21 où il explique qu'il se considère comme libre, que l'OM n'a pas son mot à dire dans l'histoire, et qu'il ne serait pas venu s'il n'avait pas été possible d'avoir cette liberté, malgré la signature d'un contrat de quatre ans. Une attitude qui passe mal pour une partie des supporters olympiens, qui n'avait pas besoin de ça vu la saison, mais aussi pour des dirigeants qui laissent filtrer des anecdotes sur le quotidien du joueur, pas si exemplaire que ça : il n'aurait pas peur de prolonger, dans le doute, ses séjours à l'infirmerie, et profite de son statut pour influer sur les compositions d'équipe de Franck Passi, notamment pour écarter André Franck Zambo Anguissa. De quoi se dire qu'effectivement, Diarra ne mérite pas une statue. Mais peut-être pas non plus ce qu'il lui arrive par la suite : à ce moment-là, Diarra doit disputer l'Euro en tant que titulaire alors qu'il est question d'un transfert à Manchester United ou au PSG. Il sera finalement forfait avec les Bleus, Paris recrute un nouvel entraîneur qui vient avec un milieu défensif dans ses valises alors que MU et Mourinho préfèrent casser leur tirelire pour transférer Pogba. Pire, cette blessure ne lui permet pas de rentrer dans le jeu des chaises musicales et d'espérer récupérer les places vacantes à la Juventus ou Séville. Alors, à défaut d'offre, il va continuer à Marseille, sans état d'âme. Toujours avec une récupération à la carte puisqu'il n'a pas fait une minute en match de présaison, mais déjà avec le brassard de capitaine...
Une décision qui peut choquer ou faire croire que la fierté et l'honneur du club sont piétinés par un mercenaire qui ne s'en cache même pas. Mais il est aussi possible de voir dans ce choix un pragmatisme rare et un ego intelligemment mis de côté. De fait, si Diarra se sert de l'OM pour se retaper et enfin partir dans une plus grosse cylindrée, l'OM se sert aussi bien de Diarra. Car le club n'avait strictement personne dans le club capable de porter le brassard de capitaine et surtout personne pour jouer au milieu de terrain à sa place. S'il s'acquitte de ces deux tâches en bon professionnel, cela sera toujours plus efficace et moins cher que si un joueur actuellement dans les listes de l'OM à ce poste s'y colle comme si c'était la chance de sa vie. En faire une affaire de principe alors que sa présence peut changer l'équipe, ce serait dommage. Surtout que le brassard est aussi allé ces dernières années sur les biceps d'éléments qui embrassaient l'écusson de leur nouveau club au bout de seulement deux matchs. Ce qu'il faut voir, c'est le bien de l'équipe. ll y a dix ans, est-ce que l'OM aurait pu finir dauphin derrière Lyon sans Franck Ribéry ? Poutant, à l'intersaison, le milieu offensif avait poussé le bouchon bien plus loin que Diarra, en allant au 20 heures pour exprimer son envie de rejoindre Lyon pour enfin évoluer avec de grands joueurs. Et derrière ? Une banderole hostile pour la première journée à Sedan, où il n'est pas dans le groupe, une explication à la Commanderie avec Niang et Beye, et tout rentre dans l'ordre dès le deuxième match de championnat où il régale le Vél de ses accélérations. La balle est dans les pieds de Diarra. Des prestations comme à ses débuts et toute cette affaire sera oubliée car justement les intérêts du club priment. Zambo ne sera même pas perçu comme une victime collatérale si l'inimitié se confirme car il n'a pas saisi sa chance, dans la zone de vérité, sur le terrain, lors des matchs de présaison. Par contre, à la fin, il n'y aura toujours pas de statue.
> En vidéo le débat du Talk Show avec notamment Karim Zéribi et René Malleville, sur la nomination de Lassana Diarra en tant que nouveau capitaine de l'OM.