Si cela ne concernait que les supporters parisiens, à la limite, ce serait compréhensible. Le football, particulièrement lorsqu'il est débattu par des personnes soutenant des clubs opposés, est souvent l'affaire de mauvaise foi. Forcément, après ce dernier PSG-OM, les fans parisiens ont insisté sur les statistiques. Comme si c'était avec ça que le classement de Ligue 1 était établi. 70% de possession, 17 tirs à rien, il faut reconnaître que ce n'est pas courant. Mais jusqu'à preuve du contraire, ça ne s'inscrit pas dans un palmarès. En même temps, c'est toujours mieux de chercher quelque chose à redire sur la performance marseillaise plutôt que de se concentrer sur son équipe et son projet, qui rêvent de plus en plus petit : avec sa ligne d'attaque Cavani, Lucas et Di Maria dans une telle forme, ça va être compliqué de songer à la Ligue des champions, et peut-être même à la Ligue 1. Mais le problème ne vient pas d'eux. Beaucoup d'autres observateurs, parmi cela même des supporters de l'OM, se déclarent déçus par le spectacle proposé. Apparemment, c'était un triste classique.
La nomination de Rudi Garcia, le discours sans fautes de Jacques-Henri Eyraud dans les médias avec son nouvel entraîneur ont donc effacé des mémoires la donne des dernières années. Rappel utile : l'OM restait sur dix défaites consécutives contre le PSG, toutes compétitions confondues, et une série de douze rencontres où ils ont encaissé au moins deux buts. Pour cette rencontre, avec en outre la blessure de William Vainqueur, Rudi Garcia disposait d'un effectif bien plus faible que ce qu'avaient Deschamps, Baup, Anigo, Bielsa et Michel, tous froissés au Parc. Mais, sur sa seule réputation d'entraîneur qui a bien fait jouer ses équipes, il devait enflammer l'enceinte parisienne. Ceux qui avaient cette attente étaient sûrement les mêmes qui s'en sont donnés à coeur joie avec Marcelo Bielsa et ses préceptes trop offensifs. En 48 heures, Rudi Garcia n'a pas eu le loisir de transformer Clinton Njié en Gervinho, c'est vrai. Mais il a ramené un point du match nul en réussissant plus d'un coup sur ses choix : il a d'abord totalement relancé Rolando. Le Portugais a fait son meilleur match avec l'OM et de loin alors qu'il était à la cave depuis le début de saison. Thauvin a ensuite joué la première mi-temps relayeur, avec la délicate mission de charger Verratti. A la mi-temps, fin psychologue, Garcia l'a déchargé de cette fonction, conscient qu'il ne pouvait pas la tenir 90 minutes et faisant alors rentrer un Zinédine Machach qui a pu évoluer dans un registre plus conforme à ses qualités. En une semaine, le club phocéen est passé d'un coach qui se fait imposer un changement par son capitaine depuis le rond central à un technicien qui avait déjà anticipé sur le scénario du match. Il n'y a peut-être pas eu de buts, mais l'effet Garcia se fait donc pleinement sentir. N'en déplaise à certains, cela reste un exploit.
Evidemment, il va être très difficile de se farcir d'autres matchs de ce calibre, où l'on regarde le chronomètre avec crainte avant même la demi-heure de jeu. Mais ce n'est pas toutes les semaines que l'OM va affronter une équipe où les joueurs présents sur la pelouse dépassent les 300 millions d'euros d'indemnités de transfert. Rudi Garcia le reconnaît sans mal, il demandera beaucoup plus de son équipe dans la circulation du ballon. Mais en attendant, vu le contexte, l'adversaire, c'était exactement ce qu'il fallait faire. Une fois de temps en temps, il est possible d'accepter une telle prestation de son équipe. De ne pas avoir peur de parler de performance même. Parce que c'est le début d'une aventure et que le football est affaire de collectif, de cohésion, de solidarité. C'est juste dommage pour certains qu'il n'y ait pas de tableaux statistiques pour mesurer ces données.