Alors que son départ était dans les tuyaux depuis plus d'un an, André Ayew n'a officialisé son départ de l'OM qu'au soir de la victoire lors de la 37e journée à Lille, le 17 mai dernier. En direct sur la chaîne du club, il livre un message peu conventionnel : "J'attendais plus, je voulais que le club ait une équipe plus compétitive l'an prochain pour pouvoir jouer le titre et ce n'est pas assuré. Et le club ne pouvait pas m'offrir le même salaire". Un discours qui n'avait pas choqué les supporters phocéens, s'attendant à voir leur guerrier rejoindre les rangs de Liverpool ou de l'AS Roma. La colère, la frustration, était alors guidée vers cette direction qui le laissait partir gratuitement, après avoir fait croire qu'il était possible de le prolonger au coeur de l'hiver. Ayew a quitté le stade Vélodrome en pleurs pour son dernier match, applaudi pour tous. Au final, certains se disent qu'ils auraient mieux fait d'avoir les mains bandées ce soir-là : libre, le joueur s'est engagé chez les cygnes de Swansea, huitièmes du dernier championnat de Premier League. Qui ne disputent pas de Coupe d'Europe, qui n'ont pas des références mondiales dans leur effectif, qui n'ont pas un manager connu pour métamorphoser les joueurs ou même une ambiance dingue dans leur stade. C'est donc ça, le nouveau challenge mieux que cet OM 2015-2016 ?
Qu'Ayew parte libre, cela avait déjà fait grincer quelques dents. Jean-Pierre Bernès dans une sortie dans So Foot, s'en était fait le porte-voix : "Ce que fait André Ayew à l'OM, je ne pourrais pas le faire. Quand il prend le maillot, le blason… Il va faire un tour d'honneur, serrer la main du président et partir sans que l'OM ne touche un euro. Ce n'est pas bien. Ça fait des années qu'il veut partir, mais avant, il n'avait pas de propositions intéressantes, et là il en a parce qu'il est libre. Briand, quand il va à Rennes aujourd'hui, il peut s'asseoir en tribune officielle, on lui donne un billet. Nasri, pareil, il a prolongé et il a fait gagner à l'OM 16 millions d'euros en partant à Arsenal". La signature d'Ayew à Swansea est un coup de grâce pour beaucoup. Il a profité de sa condition de joueur libre pour... négocier un autre gros contrat. Il y a pourtant une stratégie sportive, aussi, derrière tout ça. Mais le joueur ne peut la révéler, pour ne pas se mettre ses employeurs à dos 24 heures après avoir signé son contrat. Dans son entourage, un brin agacé, on fait remarquer que Taye Taïwo avait quitté l'OM libre pour le prestigieux Milan AC. Mais six mois plus tard, il était baladé de prêt en prêt. Ayew veut voir plus loin. Et surtout, il revient déjà de loin.
Après sa première saison complète à l'OM, il était dans le viseur d'Arsenal. La saison suivante, après une grosse campagne de Ligue des champions, c'est le Bayern Munich qui semblait être sur les rangs. Des étoiles plein les yeux après avoir joué les Allemands en quart de finale de la C1, André Ayew avait quitté son conseiller historique Etienne Mendy pour rejoindre l'écurie de Jean-Pierre Bernès, bien introduit en Bavière depuis le transfert de Franck Ribéry. Mais l'affaire ne s'est pas faite. Face à la pression des dirigeants de l'OM, qui ne voulait plus avoir à faire à un homme en froid avec José Anigo, le directeur sportif, Ayew s'est éloigné du célèbre agent français. Mais son envie de rejoindre la Premier League était toujours là. C'est d'ailleurs pour cela que Vincent Labrune l'avait prolongé avec un salaire dépassant les 300 000 euros mensuels début 2012 : les deux hommes s'imaginaient n'avoir plus que quelques mois à faire ensemble avant de se séparer sur un gros transfert. Mais trois années se sont écoulées, et Ayew est resté à l'OM. A trop vouloir forcer la porte, on casse la serrure, comme l'explique un agent du Royaume-Uni au site Hat-trick.fr: "Liverpool était vraiment intéressé, en même temps que l’Ukrainien Konoplyanka. Sauf que dans les deux cas, c’est un bordel pas possible. Liverpool nous a dit : "on aimerait faire Ayew ou lui, mais on s’adresse à qui ? On a été contacté par une dizaine de personnes, jamais les mêmes". C’est ce qui l’a tué. Ça donne l’impression du mec qui ne sait pas gérer sa carrière. Pour reprendre ce qu’on m’a dit à Liverpool : un merdier". Appâtés par l'idée de devenir son agent en lui trouvant un point de chute en Premier League, des intermédiaires en tout genre l'ont gentiment poussé à la faute. L'été dernier, il ne pouvait signer que dans les écuries entraînées par des proches de l'influent agent Willy McKay : à Queens Park Rangers avec Harry Redknapp, à West Ham avec Sam Allardyce ou à Hull City avec Steve Bruce. Dans les toutes dernières heures du mercato, il était d'ailleurs encore en négociation avec les Tigers. Il a finalement choisi de rester à l'OM, se disant qu'il y avait une chance d'être champion, lui qui ne l'avait pas été en 2010 puisque prêté à Arles-Avignon.
Il signe finalement à Swansea. Pour lui, le plus dur est fait, il est enfin en Premier League. Il y a trois ans, il n'avait pas de mal à justifier le départ de Stéphane MBia de l'OM pour QPR : "Là-bas, il aura l'opportunité de jouer. En Angleterre, il suffit de faire une grosse saison et c'est parti. Le plus compliqué c'est d'y rentrer. Après, dès que tu fais de bons matchs, tu as l'opportunité de rentrer dans de grands clubs". A Swansea, un club qui recrute peu, André Ayew a l'assurance d'être dans une équipe où il pourra jouer. En demandant un salaire important, il sait aussi qu'il aura l'attention et la considération de ses dirigeants, qui en feront directement un cadre de l'équipe. Toutes les conditions idéales pour se mettre en valeur et rejoindre une écurie plus importante par la suite. Sa première interview post-signature à L'Equipe ne dit d'ailleurs pas autre chose : "J'avais envie d'aller en Premier League, je voulais jouer dans ce pays. L'Angleterre, pour un Ghanéen, c'est quelque chose. Tout le monde voit le championnat, les gens au pays me demandaient d'y aller". Quelque part, André Ayew manque peut-être donc plus de respect aux supporters de Swansea qu'à ceux de l'OM...