La conférence de presse de Marcelo Bielsa était très attendue. Une nouvelle fois, sans grande surprise, l'entraîneur de l'OM aura choisi de décliner les propositions visant à s'exprimer sur son avenir à Marseille : "La logique est que le club propose et que le destinataire accepte ou rejette", aura simplement affirmé l'Argentin. Surfant avec brio entre les vagues répétées de questions gênantes, à la fin de la conférence de presse, et suite à une question sur Vincent Labrune, Marcelo Bielsa est parti dans un long monologue. Décryptage.
Partie 1 : les joueurs n'ont pas lâché
La leçon - Marcelo Bielsa : "Vous (les journalistes) insistez sur le fait de responsabiliser les joueurs. Ils ont joué presque au-delà de leurs possibilités. Ils ont fait tout ce qui était nécessaire et tout ce qu'ils pouvaient donner. C'est pour cela que je demande ce que l'on pourrait, devrait leur réclamer ?"
L'analyse : Marcelo Bielsa a souvent par le passé mis en avant la qualité de son effectif. Il a également déjà dit que l'OM était la meilleure équipe du championnat lorsque les joueurs évoluaient à cent pour cent. Là, il semble faire un peu machine arrière, expliquant que les Olympiens ont toujours tout donné. Le constat actuel à quatre journées de la fin, est que l'OM se retrouve cinquième du championnat et a perdu en trois semaines ses espoirs de titre, voire de Ligue des Champions. Il dédouane malgré tout ses joueurs et prend sur lui la responsabilité des précédents échecs, ce qu'il a toujours fait depuis le début de saison lorsque l'OM a déçu.
Partie 2 : "L'adversité"
La leçon : "Pour vous, il est insuffisant de décrire où sont les vraies responsabilités. N'importe quel leader, s'il devait expliquer ses responsabilités en une seule phrase dirait ceci : 'sa fonction est d’éviter que ceux qui sont sous ses ordres plient face à l'adversité'. L'équipe a dû affronter une infinité d'adversités. Je n'ai pas réussi à faire qu'ils résistent. La responsabilité est sur moi pas sur les joueurs."
L'analyse : Marcelo Bielsa prend une nouvelle fois le parti de défendre son groupe, qui n'est donc pas selon lui responsable de la situation actuelle. A travers les lignes, par le terme "adversité", El Loco revient sans doute sur les tournants négatifs de la saison. On peut citer par exemple la série de victoires stoppée à Lyon alors que l'OM dominait (de l'aveu même de Jérémy Morel, un moment clé du basculement), la longue blessure de Nicolas Nkoulou de janvier à avril, les décisions arbitrales face à Saint-Etienne, Lyon, Paris et Bordeaux. Des éléments contraires qu'il n'aura donc, de son propre constat, pas su endiguer.
Partie 3 : le niveau des joueurs
La leçon : "Mais comme vous ne croyez pas à ce que je dis, vous n'avancez pas l'analyse de ce que je fais. Bien sûr que je souhaite trouver des explications. L'explication sincère que je vous donne, c'est celle que j'ai dite antérieurement : quand je dis que les joueurs ont joué bien au-dessus de leurs possibilités, je ne le dis pas sans avoir analysé en profondeur cela".
L'analyse : Marcelo Bielsa explique souvent se baser sur des statistiques pour étayer ses propos. Il semble ici expliquer que l'OM et ses joueurs évoluaient en surrégime lors des premiers mois. Tout réussissait à l'équipe de Marcelo Bielsa. La deuxième partie de saison (à tout juste un peu plus d'un point de moyenne par rencontre) ne reflète pas non plus le niveau de l'équipe. Mais la place actuelle de l'OM semble expliquée, d'après le technicien argentin, par le niveau de ses joueurs, encore en dessous par exemple des leaders parisiens. Petit tacle glissé également envers certains médias qui ne cessent d'expliquer que le message de Bielsa ne passe plus.
Partie 4 : la base de travail
La leçon : "Mais ce qui se passe, c'est qu'il y a un autre type de regard pour expliquer la déroute : les fissures, les bagarres, les différences, la fatigue, cela génère beaucoup de possibilités pour avancer dans l'analyse. Si c'était vrai, de mon point de vue, il me serait plus facile d'y avoir recours. Mais pour moi, ce n'est pas vrai. Ca n'a rien à voir avec la tactique, le physique, ni l'organisation ni l'ordre. Cela a à voir avec la limite face à la tolérance de l'adversité, qui n'a pas été suffisante."
L'analyse : Le coach de l'OM explique ici qu'il s'appuie uniquement sur les faits, les mesures concrètes de l'efficacité de sa méthode. Et non sur les excuses de la fatigue en laquelle il dit souvent ne pas croire, ni sur les problèmes au sein du vestiaire relayés ici ou là. Nouveau tacle aux médias de la part de Bielsa.
Partie 5 : le foot et la physique
La leçon : "Si vous demandez à n'importe quel spécialiste, il vous dira que le leader a pour fonction principale d'augmenter la tolérance à l'adversité. Il y a un mot qui est la résilience. Un mot qui vient de la physique, qui est la capacité d'un corps à maintenir sa forme même s'il est soumis à des évolutions. Je n'ai pas pu maintenir cette forme face à l'adversité. Les joueurs ont tout donné pour que cela n'arrive pas, mais c'est quand même arrivé."
L'analyse : Dans cette explication, Marcelo Bielsa explique qu'il est responsable de la baisse de niveau de l'équipe, dont il aurait aimé maintenir le niveau de jeu, la pureté de la production des premiers mois. Il prend sur lui ce constat amer.
Partie 6 : les vautours
La leçon : "Si vous voyez comment se décrivent ceux qui cherchent à occuper le poste que j'occupe, ils disent tous ce qu'ils sont capables de faire ce que l'on me reproche. Ils sont tous flexibles, compréhensifs, des hommes de club, tous travaillent en commun... C'est tout ce qu'on me reproche. Et c'est ce sur quoi on me faisait des éloges à la fin de la première partie du championnat."
L'analyse : Dans cette partie, il peut y avoir plusieurs lectures. La première serait, pour les plus optimistes, de dire que Marcelo Bielsa en veut à tous ceux qui postulent actuellement pour son poste, parce que c'est un job qu'il aime et qu'il aimerait poursuivre. La seconde lecture est qu'il défend son type de management contre tous ceux qui le critiquent un peu partout. Il se défend aussi d'être un entraîneur têtu, qui n'écoute pas les autres (staff, joueurs,...), comme cela a déjà été dit à son sujet. Il refuse aussi qu'on parle de lui comme étant un entraîneur rigide du point de vue tactique. Il dit aussi que son attitude est la même et qu'elle était saluée quand l'OM allait bien, et qu'elle est critiquée aujourd'hui. Enfin, il se définit comme étant un homme de club, un mot important. Il réaffirme sa position : rien n'est supérieur à l'institution.
Partie 7 : le niveau de son effectif
La leçon : "On peut dire que les joueurs français n’ont aucune chose qui les limite face au projet de n'importe quel entraîneur. Aujourd'hui c'est Mendy et Imbula. L'an prochain ce sera Lemina, Thauvin, Batshuayi ou Dja Djédjé. Tous termineront dans des grandes équipes dans de grandes ligues. Ils finiront tous par avoir une valeur de 30 millions d'euros. Cela a à voir avec la valorisation des joueurs de l'élite. Personne ne pense que quelqu'un va dépenser cette somme pour un joueur qui ne tolère pas l'exigence."
L'analyse : Marcelo Bielsa en profite pour caresser dans le sens du poil ses jeunes joueurs, des professionnels. Une fois de plus, il met en avant la qualité de certains de ses éléments, en qui il croit. Ses jeunes talents.