Agora OM : pour Bouchet, il faut voir ce qu'il y a derrière
Par la rédaction du Phocéen
Publié le 16/02/2021 à 12:00
L'ancien président de l'OM réagit aux tensions entre les dirigeants et les supporters.
Avec ce projet d'Agora OM, visant à "réinventer le supportérisme" à Marseille, les dirigeants olympiens se sont planté une drôle d'épine dans le pied, d'autant que leur intention de remettre en cause la convention qui lie le club et les associations de supporters n'a fait qu'enfoncer le clou hier lundi. Des annonces qui provoquent, depuis, une véritable levée de boucliers chez l'ensemble des fans et même chez les élus de la ville sur les réseaux sociaux. Alors, comment interpréter cette volonté des dirigeants qui semblent perdue d'avance chez les observateurs du club ? Le Phocéen a posé la question à l'ancien président de l'OM Christophe Bouchet. Interview :
Comment analysez-vous cette offensive du club avec ce projet d'Agora OM ?
Christophe Bouchet : "J'ai un peu de mal à lire ça. Même si le système actuel n'est pas pleinement satisfaisant, il traduit quand même un certain équilibre et je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée de le rompre. Cette relation n'est pas pleinement satisfaisante, car si elle ne pose pas de problèmes quand le club gagne, on voit bien que c'est plus compliqué lorsque les résultats ne sont pas au rendez-vous. Maintenant, c'est un équilibre qui permet quand même d'avoir des interlocuteurs chez les groupes de supporters, et c'est important à Marseille, d'autant qu'ils sont installés dans le temps. On peut les contester, mais ils maintiennent l'unité de leurs groupes et assurent une présence particulière au stade".
Beaucoup voient dans ce projet une sorte de plan Leproux comme on a pu voir il y a plusieurs années au PSG...
CB : "Au PSG, ils étaient dans un état de violence inacceptable, alors qu'à l'OM, je ne vois pas bien le bénéfice d'un tel projet. Ou alors, il faut voir ce qu'il y a derrière. On serait dans un processus similaire au PSG de l'époque, avec demain un actionnaire aux poches tellement profondes que les gens vendraient de toute façon au stade, quelle que soit l'organisation pour les supporters ? Mais ce ne sont que des suppositions".
Ce serait réalisable dans un contexte comme celui de Marseille ?
CB : "J'en doute. L'ADN de l'OM d'aujourd'hui est bâti avec les supporters, qu'on le veuille ou non. On ne peut pas ignorer ce particularisme marseillais. C'est un lait sur le feu qu'il faut savoir observer et doser avec une attention de chaque seconde, mais ça contribue à ce qu'est l'Olympique de Marseille. Ça a permis aussi à certains moments de garder le club en vie. Après, il faut trouver des équilibres. On n'a peut-être jamais su, moi le premier, consacrer les moyens humains nécessaires pour s'occuper de ça au quotidien. Cette folie fait partie du système, et je ne suis pas sûr que la rompre ferait gagner beaucoup de choses au club, mais ce n'est que mon avis. Après, je comprends que les événements de La Commanderie aient influé sur cette décision, mais il faut laisser faire la justice. C'est un sujet hyper délicat, c'est très difficile de se mettre à la place de ceux qui l'ont vécu".
Ces vingt dernières années, la plupart des dirigeants qui sont entrés en conflit avec les supporters ont dû jeter l'éponge, vous avez connu ça aussi. Cela ressemble à un bras de fer perdu d'avance, non ?
CB : "En tout cas, il faut être solide (rires). La vraie question qu'il faut se poser, c'est si l'OM a vocation à être un club normal. La ligne d'Eyraud et surtout de son actionnaire, c'est de développer tout ce qui fait les revenus d'un grand club "normal" comme le Bayern ou le Real. Mais, déjà, il faut un moteur avec une équipe qui performe. Mais même avec ça, je ne suis pas sûr qu'un club comme l'OM puisse se transformer en un club normalisé. Sans un actionnaire sans limites, c'est un choix très délicat".
Pendant ce temps, l'OM doit continuer de jouer en championnat et en coupe...
CB : "Voilà, parce que le plus important est là. Il y a un effectif joueurs qui n'est pas à la hauteur, et l'énergie devrait être consacrée à rebâtir cet effectif dont le rapport coût/performances est très loin du compte".