Petit à petit, la cellule recrutement de l'OM prend forme
Par la rédaction du Phocéen
Publié le 29/03/2017 à 07:00
Longtemps, pour ne pas dire depuis toujours, la cellule recrutement de l'OM a fait débat, et les critiques prenaient généralement le pas sur les éloges. Il faut dire que ces dernières années, que ce soit sous Pape Diouf ou sous Vincent Labrune, le mercato était la chasse réservée du président, en tout cas en ce qui concernait les recrutements majeurs. Les scouts dirigés par Jean-Philippe Durand (François Brisson, Franck Passi, Michel Flos...) se contentaient généralement des seconds couteaux et du suivi des jeunes espoirs français ou européens, avec le peu de succès que l'on sait. En clair, les présidents fonctionnaient avec leurs réseaux d'agents, laissant les miettes à des recruteurs ne cachant pas parfois - en off - les limites de leur champ d'action. Mais la donne semble être en train de changer.
Lors de sa prise de fonction, Jacques-Henri Eyraud a affirmé son souhait de restructurer du sol au plafond le fonctionnement de ladite cellule. Premier étage de la fusée : l'arrivée d'Andoni Zubizarreta, avec son prestige, son passé à Bilbao et Barcelone, et surtout son réseau. Focalisés dans un premier temps sur l'urgence du mercato hivernal, le Basque et Rudi Garcia ont paré au plus pressé avec les arrivées des Payet, Evra, Sanson et Sertic. Rien de bien original avec ces transferts qui ne demandaient pas vraiment d'expertise particulière. Mais l'essentiel du travail concerne les années à venir. Pour cela, "Zubi" a fait appel à son ancien collaborateur du Barça Albert Valentin, dernièrement en poste à Saragosse. Dans un premier temps, la formation est au centre des préoccupations de la nouvelle équipe dirigeante avec les partenariats établis entre l'OM et les clubs de la région afin d'avoir un oeil permanent sur les jeunes pépites régionales, que le club a longtemps laissé échapper. Avec Valentin, l'OM pourrait aussi élargir son terrain de jeu du côté de la formation espagnole, voire sud-américaine, un secteur réservé jusque-là aux clubs de Liga ou du Portugal. Mais, au-delà de la formation, ce nouvel organigramme va évidemment se concentrer sur l'équipe première en constituant le réseau international qui manquait à l'OM. Un maillage élargi, concentré non pas sur les joueurs déjà confirmés, mais sur les "bons coups" à ferrer avant que les prix ne s'envolent.
C'est justement ce travail qu'a réalisé Antonio Salamanca à Villareal durant quatre ans, avant de quitter le club espagnol cette semaine. Ce recruteur franco-espagnol, que les rumeurs envoient d'ailleurs à l'OM - ce qu'il dément - a auparavant exercé à Liverpool et Tottenham, parcourt des dizaines de milliers de kilomètres par an à la recherche de la bonne surprise à forte plus-value et s'est constitué une base de données incomparable. Il explique au Phocéen le fonctionnement d'une cellule de recrutement made in Liga : "C'est tout d'abord un travail où l'on est toute l'année sur la route et dans les avions. On divise la cellule par le nombre de scouts et le nombre de pays à prospecter. On a 3 ou 4 pays à gérer chacun, et au milieu de l'année, on intervertit. Par exemple, celui qui suivait la France, la Belgique et les Pays-Bas, se retrouve à suivre la Suisse, le Portugal et la Pologne. Cela nous permet un échange au niveau des informations et surtout de les croiser, afin de confirmer ou non nos ressentis. Ainsi, la marge d'erreur est limitée. Mais avant de se déplacer, on compile d'abord plusieurs éléments. Il s'agit de savoir si le joueur a une clause de sortie, s'il a une marge de progression... on ne prend pas un match au hasard juste pour voir un match. Si je vais voir un Lille-Bordeaux ou un Genk-Anderlecht, c'est parce que je sais qu'il y a un défenseur central intéressant qui est susceptible de bouger et de s'adapter à notre jeu. Mais avant d'y aller, j'ai déjà tous les éléments le concernant dans ma base de données, son prix, son contrat, son style de jeu, sa mentalité... tout cela, je l'ai glané en amont auprès de mes contacts, qu'ils soient entraîneurs ou agents, et je l'ai mis à disposition de mes collègues".
Autre spécialité ibérique, la détection précoce des talents sud-américains, qui échappent généralement aux clubs français. Là encore, Antonio Salamanca nous livre le mode de travail : "On a des personnes sur place qui font partie du réseau, des gens avec qui on travaille depuis longtemps et qui nous préviennent sur la situation d'un jeune joueur de Boca Junior ou de Colo-Colo, par exemple, susceptible de nous intéresser par sa progression et sa situation contractuelle. Si tous les éléments sont réunis, on se déplace, mais on a aussi des représentants là-bas à longueur d'année. Ils couvrent toutes les compétitions de jeunes, c'est leur spécialité. On n'hésite pas à en faire venir certains quelques jours à l'essai si les rapports sont vraiment concluants. C'est le seul moyen de faire de bonnes affaires, car dès qu'un Brésilien ou un Argentin commence à faire parler de lui, c'est trop tard, il est déjà hors de prix". Constituer des réseaux et un savoir-faire, être présent au bon moment pour convaincre un jeune joueur, mais aussi ne pas se tromper sur l'état et la motivation d'un élément confirmé, autant d'évidences que l'OM ne doit plus négliger. Monaco a su le faire ces dernières années, et en récolte les fruits cette saison. Les Olympiens ne sont pas plus bêtes que les autres, ce n'est qu'une question de volonté. Il ne reste plus qu'à se mettre au travail...