OM-PSG : le missile de Sauzée à la 91e minute !
Par la rédaction du Phocéen
Publié le 07/02/2021 à 14:30
La rubrique Histoire OM, sous la plume et les souvenirs de Fernand Bonaguidi. En vidéo, retrouvez Franck Sauzée dans le Talk-Show du Phocéen.
Ce soir-là, l'OM de Bernard Tapie a rendez-vous avec la gloire ! On en est à la troisième saison de Bernard Tapie à l'OM, qui a terminé deuxième derrière Bordeaux en 1987 et seulement sixième en 1988, Monaco étant champion cette année-là. En ce début de saison 88/89, le Boss est d'une humeur massacrante. Les nouveaux venus (Sauzée, Huard, Cantona, Vercruysse, Di Méco (de retour de Nancy), Thys, Bruno Germain) peinent à faire oublier les partants (Giresse, Domergue, Passi, Genghini, Ayache, Brisson). Après deux journées, sanctionnées d'un nul au Vélodrome contre Montpellier et d'une défaite à Lille, le patron de l'Olympique de Marseille décide de remplacer Gérard Banide. Et surprise du chef, il intronise l'ancien gardien de but Gérard Gili, alors responsable du centre de formation.
L'OM va se retrouver à la lutte avec l'équipe parisienne du président Borelli. A trois journées de la fin, les coéquipiers de Jean-Pierre Papin se retrouvent à un point du PSG. 65 contre 64, et avec la victoire à 3 points : l'OM passerait devant avec deux points d'avance. On n'a qu'une alternative: gagner !!! Et ça va être une rude rencontre. Le Vélodrome est plein et l'OM, s'il reprend la tête du championnat, va tenir son destin entre ses mains. Dans son mano a mano avec les Parisiens, l'OM finira par avoir le dernier mot, face à une équipe parisienne ultra défensive, puisque Tomislav Ivic en est l'entraîneur... A Marseille, Gérard Gili, jeune coach intronisé par Bernard Tapie, prend plus de risque avec son équipe et une attaque Papin/Allofs qui fait souvent des ravages. Pourtant, Bernard Tapie embauchera plus tard Ivic à deux reprises, en 1991 et 2001, comme quoi... Car le yougoslave a gagné beaucoup de titres, mais sans produire du jeu. Pour lui, c'est le résultat à tout prix. Et dans cette rencontre au sommet, le PSG d'Ivic est là pour défendre, en alignant un maximum de joueurs devant les buts de Joël Bats.
Les occasions vont être plutôt rares, d'un côté comme de l'autre. Les Marseillais, quoi qu'il en soit, sont longtemps tenus en échec ce 5 mai au StadeVélodrome, même s'ils dominent outrageusement. Ils vont finalement faire la décision à la 91e minute (1-0) grâce à un tir lointain mais surpuissant de Franck Sauzée, juste après que Amara Simba, bien alerté par Susic, eut raté l'occasion de sa vie. Gaëtan Huard, sur ce coup, réalise un miracle en sauvant son but devant le Parisien parvenu seul devant lui. Après le match, Ivic se défendra de sa tactique défensive : "Vous me dites que Paris-SG est une équipe défensive qui n'a pas joué sa chance à fond. Je vous réponds : où avez-vous vu cela ? Vous me dites que Paris-SG ne peut pas gagner s'il n'attaque pas. Je vous réponds : moi j'ai vu trois attaquants de pointe parisiens sur le terrain. Notre avant-centre, plus Calderon, plus Safet Susic..."
Pourtant, on verra même Jean-Pierre Papin en position de premier contre-attaquant dans le rond central, entouré de six joueurs parisiens, jusqu'à déclencher quelques sourires... JPP a avoué "qu'il ne pourrait pas jouer dans une équipe telle que celle-là" et que "leur avant-centre avait beaucoup de mérite". Paris a probablement choisi de s'autodétruire, et la frappe de Franck Sauzée dans les arrêts de jeu éclate comme une justice et une sanction. Un tir, un seul, pour dénouer tout un championnat ! L'OM a fait le plus dur avec ses deux points d'avance, deux matches nuls sont concédés ensuite par le PSG, à Lens, lanterne rouge (0-0), et face à Metz (2-2). Les Marseillais, eux, gagnent à Toulon et redeviennent champions de France après le titre de 1972, en battant Auxerre (2-1, avec un doublé de Papin) lors de la 37e journée. On termine le Championnat avec 3 points d'avance, car on finit en roue libre à Montpellier (0-1). Et c'est la fête sur la Canebière !
Interview à chaud de Franck Sauzée : "Honnêtement, je n'ai pas réfléchi. J'ai passé la balle de mon pied gauche sur mon pied droit. J'ai à peine relevé la tête et j'ai frappé. Je n'ai plus pensé à rien. Ce qui est fantastique à Marseille, c'est la réaction du public. Il explose en même temps que la balle franchit la ligne. C'est fou de voir instantanément 40 000 personnes se lever et laisser éclater leur joie." Tu es un spécialiste du genre, comment travailles-tu particulièrement ta frappe ? "A Sochaux et avec les Espoirs, j'ai quelquefois marqué ce genre de but. Ayant de plus en plus confiance, je n'hésite pas à prendre ma chance. Il faut que je sois en bonne position, pas d'écran devant moi. Pour ce qui concerne la spécificité, non ! Je le dis franchement : je ne travaille pas particulièrement ma frappe de balle. Je crois que c'est une qualité naturelle comme d'autres sont doués par le jeu de tête." Comment te sens-tu à l'OM? "Au début, j'ai un peu souffert car physiquement, j'étais au bout du rouleau, usé par le parcours de Sochaux et celui des Espoirs. Je n'avais pratiquement pas coupé. Et puis, au gré des absences, on m'a déplacé d'un poste à l'autre. Aujourd'hui, je me suis particulièrement stabilisé. Je suis un numéro 8 qui aime jouer dans l'axe, sur son pied droit. Voilà, c'est simple. Je suis bien à Marseille car je suis originaire de l'Ardèche, celle qui est tournée vers le sud. Ma femme est marseillaise. Nous avons retrouvé ici le soleil, l'accent et la joie de vivre. “ Revenons sur le match. L'OM marque dans les arrêts de jeu. Est-ce de la chance ? "Souvent, depuis le début de la saison, nous avons marqué dans les dernières minutes, ce qui prouve notre obstination. Et puis, la logique sportive est préservée. Le jeu des Parisiens ? Ils étaient huit à défendre. A Marseille, si l'on jouait comme ça, les gens nous jetteraient des pierres. Et ils auraient raison."
Important de faire parler celui qui a été décisif, et comme un bonheur n'arrive jamais seul, la Coupe de France sourira contre Monaco (4-3) un mois plus tard. Un doublé pour Bernard Tapie, dix-sept ans après celui de Marcel Leclerc en 1972... Que du bonheur! A noter qu'Eyraud jouait ce soir-là à l'OM, il entra en jeu à la 76eme minute pour remplacer Vercruysse. Son prénom : Patrice !
5 Mai 1989 au Stade Vélodrome, l'OM bat le PSG 1-0 (0-0)
Arbitre: Mr Vautrot - 35572 Spectateurs - But : Sauzée, 91eme
OM : HUARD - THYS, FORSTER, LE ROUX, DI MECO - GERMAIN, SAUZEE, GASTIEN (MEYRIEU 57'), VERCRUYSSE (EYRAUD 76') - PAPIN, ALLOFS - Entraîneur : GILI
PSG : BATS - POLANIOK, DREOSSI, PILORGET, CHARBONNIER, TANASI - SENE, CALDERON, SUSIC, PEREZ - XUEREB (SIMBA 72') - Entraîneur : IVIC