OM Actualités Foot de l’Olympique de Marseille

Rejoignez notre communauté

pour profiter de vos avantages

Thème d'affichage
Autour de l'OM

OM : les confidences de Cana sur ses 4 ans à Marseille

Par la rédaction du Phocéen

Publié le 12/03/2023 à 18:00

OM : les confidences de Cana sur ses 4 ans à MarseilleOM : les confidences de Cana sur ses 4 ans à Marseille

Lorik Cana est revenu en longueur sur ses quatre ans à l'OM dans un entretien accordé au Phocéen.

Voici un passage de l'interview de Lorik Cana lors du Salon des Légendes. L'intégralité de l'entretien réalisé par Le Phocéen est à retrouver en vidéo.

Lorik, revenons sur ton transfert de Paris à Marseille en 2005. Qui vient te chercher ?

Lorik Cana : "Personne. Je suis à la maison, j’appelle Christian Larièpe au téléphone, un ami (il venait de rejoindre l'OM à la formation, ndlr). Je lui dis : "Écoute, tu vois avec le coach Jean Fernandez, Pape Diouf et tu leur dis : s’ils me veulent, je viens !". Le transfert est arrivé de nulle part, car Marseille était en grande difficulté, Jean Fernandez ne croyait pas que ça allait pouvoir se faire. Mais, quand Pape Diouf est entré en jeu, ça s’est décanté".

"Pape venait dans le vestiaire et il disait : "Les gars, on a le 2e budget, vous êtes les 2es joueurs les mieux payés, pourquoi on n’est pas 2e ? Est-ce que quelqu’un peut m’expliquer ?"

Cette saison-là, vous finissez avec 2 points de retard sur la Ligue des Champions. Avec une défaite en finale de Coupe de France contre Paris…

LC : "On avait commencé de manière catastrophique avec 2 ou 3 points en 5 matchs, mais on a enchaîné derrière avec un rythme de Ligue des champions. À partir du match de La Corogne notamment. Je suis arrivé le lendemain de ce match. On a loupé la LDC de peu. Mais, cette année-là, il y a un groupe d’arrivée de joueurs qui a créé un noyau. Cela a permis à l’OM de lancer une bonne dynamique et de rester à un niveau élevé. Je suis arrivé avec Mamad (Mamadou Niang), avec Franck (Ribery), Wilson Oruma, Sabri (Lamouchi) et Taye Taiwo. Ce groupe de nouveaux a vite réussi à s’intégrer avec ceux déjà en place comme Samir Nasri. Un autre joueur qui est arrivé en cours de saison et qui a été extraordinaire pour nous, ça a été Mickaël Pagis. Contre Paris, il y a 3 matchs complètement fous. Le premier, mon premier de l’autre côté, où je marque et qu’on gagne 1-0. Le deuxième, le choix de fort de partir avec les Minots. Pape Diouf, il était extraordinaire, il avait une telle aura qu’il pouvait prendre ce genre de décision sans consulter les dirigeants ou les joueurs. On savait que quand il avait arrêté sa décision, il avait déjà beaucoup réfléchi, sondé les supporters. Du coup, quand il l’annonce, personne ne le conteste. C’était lui le boss. Puis, arrive la finale de Coupe de France. On est les super-favoris. On pouvait gagner un premier trophée après très longtemps. Mais, Paris a eu une grosse envie de revanche. Ils ont mieux entamé le match que nous, on n’a pas réussi à revenir dans le match. Leur victoire était méritée. C’était une première année assez intense".

À l’été 2006, Modeste M’Bami, ton ancien coéquipier de Paris, te rejoint. Tu as dû être très touché par sa disparition...

LC : "Dans toute ma carrière, Modeste était le 3e joueur avec qui j’ai fait le plus d’apparitions. C’était sûr que c’était inattendu, à 40 ans… Ça m’a complètement choqué. J’avais continué d’entretenir ma relation avec lui, après son passage à OM et la fin de sa carrière. Ça remet les pieds sur terre. C’était un gars extraordinaire. On est très triste, pour sa famille, ses enfants… Je garde que de bons souvenirs. Mes premiers pas en professionnel, c’est avec lui. On a passé 3 ans à Marseille ensemble. Sa disparition n’a pas été facile à digérer".

La saison 2006-2007 a été magnifique pour l’OM. Vous finissez 2e du championnat en pratiquant un très beau football...

LC : "On finit 2e, mais c’était difficile de faire mieux avec Lyon. La première année où j’ai joué avec Paris, on les a un peu titillés. Mais sur toute une année, ils avaient une marge d’avance. Tu pouvais les battre sur quelques matchs, mais ils avaient un effectif et des moyens financiers supérieurs aux nôtres. Tout cela faisait que c’était très compliqué de les challenger sur toute une année. C’était une équipe qui prétendait à aller jouer les quarts ou les demis de la Ligue des champions. Je me souviens de certains discours de Pape Diouf quand on avait des coups de moins bien. Il venait dans le vestiaire et il disait : "Les gars, on a le 2e budget, vous êtes les 2es joueurs les mieux payés, pourquoi on n’est pas 2e ? Est-ce que quelqu’un peut m’expliquer ?" (rires). Ça, c’était quand on était 3, 4 ou 5e. C’était une top saison où on s’est régalé. Par contre, elle devait se finir avec un trophée. Tout le monde le méritait, le club, Robert (Louis Dreyfus). Elle aurait dû se terminer avec la cerise contre le gâteau contre Sochaux".

"C’était un coup dur notamment, car j’avais vu Robert qui était triste"

Pour toute une génération, c’est la frustration des années 2000. Tu fais un parcours incroyable avec le match contre Lyon notamment. Mais tu perds contre Sochaux en finale…

LC : "Lors du match contre Lyon, j’ai cru que le stade allait tomber. Ils étaient archi favoris, ils mènent 0-1. On a joué le tout pour le tout. Sur la dernière demi-heure, les deux latéraux, Habib Beye et Taye Taiwo montaient. Le coach m’avait laissé tout seul en défense. Il avait mis tout le monde en attaque : Nasri, Ribery, Niang, Pagis et Cissé. C’était une équipe de kamikaze, mais ça a fonctionné. Après on arrive en finale en sachant pertinemment que Sochaux avait une superbe équipe avec des joueurs comme Karim Ziani. On a deux fois l’avantage dans le match. On se fait égaliser à deux minutes de la fin de la prolongation. C’était un coup dur notamment, car j’avais vu Robert qui était triste. Pour nous aussi évidemment, mais pour un homme qui avait fait autant de choses pour le club, on voulait lui offrir ce trophée".

Qu’est-ce qu’il s’est passé, comment l'expliquer ?

LC : "C’est un match de foot. Quand t’arrives en finale, tu peux gérer et puis il suffit d’une mauvaise lecture de trajectoire et t’encaisses une tête décroisée. Je la revois encore… Cela ne doit jamais arriver à 2-1. Tu dois boucler et c’est fini".

Ce sont donc les années du patron Lorik Cana qui est promu capitaine de l’OM pendant deux saisons. Le plus souvent sous les ordres d’Eric Gerets, troisième en 2008 puis deuxième en 2009. La folie quand même ces deux saisons, en étant capitaine ?

LC : "Oui avec deux saisons pleines en Ligue des Champions aussi. Avec énormément de regrets la première année avec la Ligue des Champions. Puisqu’on commence l’année avec Albert, on gagne le premier match en Ligue des Champions. On commence en difficulté en championnat mais on gagne le premier match en Ligue des Champions. Après ils décident de changer Albert et puis il y a ce bonhomme assez particulier qui arrive. Tu connais un petit peu son nom en tant qu’ancien joueur. Il y a ce bonhomme qui arrive, qui a un impact extraordinaire sur tout le monde. Puis on commence une remontée en championnat et un parcours en Ligue des Champions. Son premier match c’était Liverpool-OM. Et à partir de là on est allé de l’avant, c’est quelqu’un qui a eu un super impact. Je pense que les Marseillais étaient des gens pour lesquels le coach Gerets était parfaitement taillé. Et puis on va de l’avant. On a des regrets de ne pas avoir passé la phase de poule, cette année-là, parce qu’on commence avec deux victoires. On gagne 1-0 contre Porto à 10 minutes de la fin mais on se fait égaliser à la fin, donc Porto arrache le nul. On fait trois matchs, sept points les trois premiers matchs. Et puis après le match qui est décisif, c’est le match au Portugal... et tu joues ta qualification à la maison où tu dois faire un nul minimum contre Liverpool et après ça devient compliqué. Mais voilà, des saisons pleines et puis le grand regret de cette génération-là qui était avec le coach Gerets, qui était avec Pape, c'était l’année d’après pratiquement parce qu’on est une des équipes favorites, même si c’est difficile, à ce moment-là d’être favori parce qu’il y a Lyon. Mais la première année, pratiquement, où Lyon cède et que nous on commence à être en position, surtout à partir de la deuxième partie de championnat après être très constant, on se retrouve avec une équipe qui, pratiquement, marque l’histoire. Une équipe qui pour la première fois de l’histoire de la Ligue 1 gagne ses 11 derniers matchs. Parce que je me souviens, à une dizaine de matchs, huit matchs de la fin on était encore à +5 et puis l’équipe de Bordeaux qui fait un truc impensable les 11 derniers matchs et qui est champion à la fin. Donc ça c’est sûr, c’est le regret de ne pas voir fini champion. Mais je pense qu’on avait fait un parcours largement de champion et puis pour les gens on était une équipe dans laquelle ils se voyaient".

Est-ce que tu n’as pas un autre regret ? Je vais expliquer ma question, au début des années 2000, on a la période Drogba en Coupe d’Europe avec la finale de Coupe d’Europe. Après vous il y a eu Deschamps qui va en quart de finale de Ligue des Champions avec une très belle campagne, après ça on a l’équipe de Garcia qui arrive à aller en finale d’Europa League. Tu vois où je veux en venir ? C’est-à-dire que vous, vous n’avez pas marqué de votre empreinte les campagnes européennes, notamment en Europa League. Je vois les noms de ceux qui vous ont éliminé, le Zénith et le Shakhtar ? Pas déçu sur ça ?

LC : "Les deux qui ont gagné !"

C’est vrai… Bien répondu ! Mais tu n’as pas une petite déception là-dessus ?

LC : "Oui, mais la déception est justement pour ces raisons-là. Parce qu’en fait, on se fait éliminer par ceux qui ont gagné. Et sur les matchs là on est pratiquement meilleurs. Donc potentiellement on avait l’équipe pour gagner l’Europa League. Après c’est sûr que tu passes les quarts de finale, il reste quand même la demi-finale et la finale donc chapeau. Mais le Zénith... 3-0 ici et 89e minute... Archavine met le 3-1, un but extraordinaire. Il met le 3-1 et on se retrouve à jouer le match retour dans un terrain pourri en Russie. Ils n’avaient pas encore le nouveau stade. Au mois de mars et ils gagnent 2-0 et donc élimination. Et après le Shakhtar c’est quand même une équipe qui était régulière, qui était top en Ligue des Champions avec les Brésiliens, Adriano et tout ça. Et c’était un match super équilibré et à la fin c’est eux qui passent, mais c’est sûr que la partie Européenne était une partie importante. Mais nous ce qu’on voulait surtout c’était, déjà, de regagner un titre mais surtout de redevenir champion de France et ça, ça nous prenait beaucoup d’énergie".

"Je le sais déjà en avril que je vais partir"

Il y a quelque chose qu’on veut comprendre, que tu vas nous expliquer... Pourquoi tu pars alors que les bases pour le titre sont quasiment posées ?

LC : "Je l’avais déjà dit non ?"

Il y a l’arrivée de Deschamps aussi...

LC : "Je le sais déjà en avril que je vais partir. Je n’avais pas le projet de partir, ça ne me passait pas beaucoup par la tête. Tout simplement parce que j’étais dans l’endroit où j’étais bien, le club avait les intentions de me re-prolonger mais en fait ce qu’il se passe c’est que les derniers mois, à partir de février-mars, on comprend un petit peu que quelque chose ne va pas bien avec Robert. Et puis il y a Pape qui est dans une situation un peu fébrile avec le conseil d’administration. Et il y a Eric Gerets qui voulait un petit peu des certitudes pour que les choses aillent de l’avant puisqu’on se retrouvait avec une situation de club qui était, avec une base de joueurs qui était quand même importante, avec une situation financière qui était quand même très importante. Et donc moi ce que je voulais c’était de continuer avec Pape et avec Gerets. Puis le coach me dit "Lorik je ne pense pas que je vais rester parce qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond et ils ne font pas ce qu’il faut faire pour nous laisser aller de l’avant". C’est-à-dire que quand le coach Gerets est parti et puis que la situation de Pape était ainsi, moi à ce moment-là j’avais déjà pris ma décision".

Tu avais compris qu’il allait partir à ce moment-là ?

LC : "J’ai dit à Pape "si le coach part, je pars". Après je ne savais pas encore où j’allais partir, Didier Deshamps m’avait appelé, il a été top, il voulait me retenir, il voulait qu’on travaille ensemble".

On raconte beaucoup que c’est Deschamps qui te voulais pas vraiment alors qu’en fait ce n’est pas forcément ça ?

LC : "Non, au contraire. Moi j’étais en sélection, je préparais un Albanie-Portugal, le coach m’avait appelé. Il me dit "Lorik je sais que Pape m’a dit que tu voulais partir", il me parle déjà un petit peu de comment il voulait jouer".

"Si j'étais resté, il ne prenait pas Mbia"

Il t’aurait mis en sentinelle ?

LC : "Oui parce que si moi je restais il ne prenait pas Mbia. Et donc il parlait déjà un peu mais je lui avais dit "coach…". Rien contre lui, au contraire, vu le personnage. Il a marqué, après, encore plus l’histoire du football français. Je n’avais aucun doute que le club, même avec les gens qui ont été emmenés. Il y a Gabi (Heinze) qui est arrivé, il y a Lucho qui est arrivé, l’équipe avait fait encore un pas supplémentaire. Mais à un certain moment il y a des choses qui se font sur le principe et sur le respect, donc moi, il y a des choses qui ne me plaisaient pas. Il faut une certaine solidarité entre les personnes donc moi au moment où Pape et Gerets étaient mis en discussion…"

On va le dire clairement, tu ne te voyais pas continuer avec l’équipe de Labrune ?

"Moi je ne le connaissais pas. Tu sais qu’il est venu me chercher après ? Ma dernière année. Donc moi je ne le connaissais pas personnellement, je n’avais rien personnellement contre lui. Mais tout simplement je trouvais que c’était fou qu’un club qui a été géré d’une manière extraordinaire pendant des années, avoir un patrimoine joueurs, avoir une histoire, avoir une identité qui revient, avoir les performances qui reviennent, qui vont seulement crescendo... Après ce n’est pas ma position, en tant que capitaine et joueur, de décider ce qui va se faire, par contre je prends mes décisions. Si mon entraineur et mon Président ne sont plus là, moi je les suis".

Tu as regretté ?

LC : "Non, pas du tout. Je ne l’ai pas regretté, j’ai surtout regretté que l’on n'ait pas été champion. Il faut remettre après les choses, même si l’OM était dans une situation avec un super effectif, et venait d'une super saison, l'OM n'était pas le favori, mais un des favoris, il y avait encore Lyon encore dans le jeu. Donc ce qu'a fait Didier Deschamps, il faut lui tirer notre chapeau. Ne pas avoir été champion la saison précédente, ça oui, j'ai regretté, parce qu'on a fait un parcours extraordinaire. Labrune, on aurait pu se rejoindre en 2015, mais j'avais déjà donné ma parole à Kita à Nantes".