Mediapro : Dassier met en cause les présidents de clubs

Depuis la semaine dernière, le football français marche sur un fil avec l'affaire Mediapro. En effet, après seulement deux mois de compétition, le nouveau diffuseur de la Ligue 1 fait déjà défaut en refusant de payer la traite du mois d'octobre (172 M€). Un drame pour l'économie et même l'avenir immédiat des clubs français, comme l'explique au Phocéen Jean-Claude Dassier. L'ancien président de l'OM n'est pas tendre avec les dirigeants actuels de la Ligue 1, qui ont opté pour le diffuseur espagnol lors des dernières négociations sur les droits TV. Interview.

Comment l'ancien président de l'OM analyse-t-il cette situation ?

Jean-Claude Dassier : "Ce qui est sûr, c'est que le football français est dans une passe très compliquée. Mais, quand on voit la manière dont il est dirigé, je ne suis qu'à moitié surpris, tout ça n'est pas très sérieux. Pour être clair, je pense que les présidents de clubs actuels ne sont pas tous au niveau".

Vous estimez que leur responsabilité est engagée, alors que c'est Mediapro qui refuse de payer ?

JCD : "Ils n'ont vu que le bénéfice immédiat, étant à la recherche du maximum de recettes, ce qui peut se comprendre. Mais il y avait un risque en signant avec une société qui proposait de telles sommes sans qu'on se soit vraiment interrogé sur l'histoire de cette entreprise et les conditions dans lesquelles elle a pu proposer cela, sachant que tout espoir de rentabilité était quasiment impossible".

Vraiment impossible, y compris sur le long terme ?

JCD : "C'est bien gentil de promettre des milliards, mais il fallait quand même se demander avant si les Français étaient prêts à payer encore un abonnement supplémentaire à ce prix-là. Ca me parait quand même très incertain, surtout en ce moment ou tout le monde fait attention à ses fins de mois. Même chose pour les dirigeants de clubs qui doivent garantir leur budget alors qu'il n'y a plus personne dans les stades. C'est pour cela que je répète que le football français est vraiment en péril avec cette affaire".

Il ne fallait donc pas signer ce contrat ?

JCD : "Disons qu'on s'est engagé dans une voie qui était certes séduisante, mais on constate que le gars qui était censé distribuer des milliards ne parvient pas à assumer sa signature. Si le principal commanditaire du football français fait défaut, je ne sais pas comment ça va se terminer, mais c'est une extraordinaire préoccupation. On est mal".

Voyez-vous une issue possible ?

JCD : "Je ne suis plus aux affaires, mais les clubs étaient déjà dans une absolue nécessité avec la crise sanitaire. J'ose espérer que la Ligue va trouver une solution d'attente pour sauver le football français, on en est là quand même ! Il y aura surement des discussions avec Canal et BeIN pour rattraper le coup, mais à quel prix ? Je me souviens lorsque j'étais encore dirigeant que la Ligue avait monté sa propre chaîne dans le but de diffuser elle-même les matches, mais ça n'est pas allé plus loin qu'une saison de Ligue 2 et ce n'était pas viable. On ne peut pas être à la fois organisateur, financier, producteur et diffuseur sur un tel barnum. On avait quand même avec Canal Plus un diffuseur historique qui faisait bien le boulot, mais on a privilégié une solution financière immédiate qui se révèle aujourd'hui acrobatique et dangereuse".