Ex-OM : quand Evra revient sur son passage à Marseille
Par la rédaction du Phocéen
Publié le 29/01/2022 à 08:37
Joueur de l'OM en 2017, Patrice Evra a fait beaucoup parler pour la sortie de son autobiographie ces dernières semaines. Mais qu'y trouve-t-on vraiment ?
De son transfert de la Juventus à l'OM à sa signature à West Ham, il n'y a que 20 pages sur les 400 du livre. C'est 5%. C'est peu, mais ça serait presque beaucoup sur son passage à Marseille par rapport à sa carrière, à sa vie, que ce soit son enfance dans la banlieue des Ulis, sa circoncision forcée au Sénégal à l'âge de 10 ans, les menaces de gros bras à Nice pour qu'il prolonge son contrat, l'épopée en Ligue des champions avec Deschamps, Manchester United avec Ferguson, la Juve, et bien évidemment l'équipe de France, que ce soit avec Domenech, Laurent Blanc ou Deschamps. Ceci dit, 20 pages, c'est largement suffisant pour se rendre compte que le point de vue du héros nous fait partir parfois dans une histoire qui n'est plus vraiment la réalité.
Ce qu'il s'est passé à Guimaraes
Commençons donc par le plus choc, ce fameux coup de pied adressé à un supporter un soir de novembre pour un match d'Europa League à Guimaraes. Ce qui lui vaut, encore aujourd'hui, le fait d'avoir le nom d'un bonus dans le jeu de fantasy football "Mon Petit Gazon". La "nouvelle version" de Patrice Evra, celle donnée dans le livre qui rejoint ce qu'il a pu dire lors de sa grande tournée médiatique, est la suivante : un homme lui aurait d'abord demandé d'arrêter de gesticuler comme un singe, puis, qu'il allait égorger ses enfants une fois sur Marseille. Le racisme, il a connu ça en Italie, passe encore, mais la famille, c'est sacré et le joueur aurait alors tilté. De quoi avoir encore aujourd'hui "des poils de ce supporter sur sa chaussure" pour reprendre la punchline qu'il affectionne tant il l'a récité. C'est à ce moment que le récit du livre diffère de la version des plateaux télés, plus show off. Evra explique comment il a vécu la scène, les différentes étapes, et cela change. C'est que celui à qui il porte un coup, c'est le premier qui vient vers lui, pas celui qui l'avait forcément insulté en dépassant les bornes. Ce n'est pas pareil. Et cela rend plutôt caduc le discours du latéral gauche dans les médias qui assure que la personne en face de lui n'était même pas un supporter de l'OM. Il se trouve que c'en est un, qui paie de sa poche pour faire des déplacements, pour voir jouer son équipe et pour donner de la voix, afin que la réputation des supporters de l'OM perdure en Europe.
Un seul bon match et...
Le plus intéressant, c'est quand Evra évoque sa signature. Le lendemain de la visite de Zubizarreta à Turin pour le convaincre de signer, Evra se fait une déchirure d'un centimètre à la cuisse avec la Juve. Il l'aura encore à sa visite médicale à Marseille mais il parviendra sans mal à duper le médecin de l'OM. Après quelques matchs, elle faisait deux centimètres. Mais Evra fit comprendre au doc qu'il fallait quand même qu'il joue contre le PSG, pour le sommet de la saison. La cuisse strappée comme une momie, deux anti-inflammatoires avant le match, et en avant. La suite, on la connaît : une sortie à la mi-temps, et une défaite 5-1 au final. Quand il évoque ces moments où cela va moins bien, à Marseille, Evra sait qui pointer du doigt : les médias ! Qui veulent lui mettre sur le dos des défaites auxquelles il n'a pas participé, qui jubilent en se disant "on l'a eu !". Mais est-ce vraiment le cas ? Dès sa signature, les suiveurs réguliers de l'OM ne voulaient pourtant qu'une chose : qu'Evra réussisse à l'OM. Il fallait faire oublier le fiasco Henri Bedimo à gauche. Un OM qui joue le haut de tableau, c'est plus vendeur pour ceux qui sont chargés de décrire le quotidien du club le plus populaire de France. Alors si c'est en plus avec un "bon client" capable de faire de gros titres, personne ne va s'en plaindre. Si Evra n'a finalement jamais tenu ce rôle, ce n'est pas à cause de consultants qui voulaient sa tête, c'est juste parce qu'il n'a pas été à la hauteur sportivement. Dans ces moments-là, il est difficile d'être crédible dans un vestiaire mais aussi auprès des supporters. La vérité est aussi simple que ça.
21 matchs en 10 mois à l'OM
En dix mois, Patrice Evra a fait 21 matchs à l'OM. C'est peu là aussi. A bien y regarder, il n'y en a qu'un où il a été top. Une victoire contre Nice en 2016-2017 qui était alors sur le podium. Vraie grosse perf donc. Intraitable derrière, Evra a même mis le but du 2-1 d'une tête plongeante. Ce match, ce but, Evra le décrit comme ça : "J'ai célébré en faisant des pompes, la vie est belle". Pourquoi pas, mais la description est incomplète. Avant le match du dimanche soir, Evra avait accordé un entretien à William Gallas sur RMC Sport. Où il s'en était pris à Dugarry, assurant qu'il savait exactement combien Zidane avait de poils pubiens. C'est donc dans cette atmosphère qu'Evra a marqué et célébré en imitant ses attributs masculins devant le virage après ses pompes, pour persister et signer. Alors forcément, derrière... Et quand bien même, ils n'ont en rien influencé les supporters à se sentir gênés après le visionnage le lundi des vidéos sur Instagram du joueur, fussent-elles pour donner de la nourriture à des SDF. Ils pouvaient l'être par eux-mêmes... L'ouvrage reste donc intéressant, mais il est impératif de ne pas oublier le parti pris du narrateur. Vous pourrez retrouver l'intégralité de la critique de ce livre dans Le Phocéen Mag du mois de février.