Il y a encore quelques semaines, le pauvre Bouna Sarr (25 ans) faisait encore partie des têtes de Turc des suiveurs olympiens sur les réseaux sociaux qui retenaient plus une malencontreuse photo de vacances postée il y a deux ans sur son compte Instagram que ses performances de milieu inoffensif à l'OM. Une sale période pour ce pari venu de Metz à l'été 2015 pour 1,5M€ et bien parti pour finir dans la colonne pertes et profits. Seulement voilà, le garçon est accrocheur et le football réserve parfois de belles revanches. Testé une première fois par Frank Passi au poste de latéral droit, Bouna avait (encore) fait rire tout le monde. Plus tard, rebelote. Garcia le teste à nouveau, mais avec un léger mieux. Pas de quoi envoyer Sakai sur le banc, mais l'expérience est intéressante et l'ancien Messin peut faire l'affaire en cas de coup dur pour le Japonais, tout comme Boubacar Kamara.
Marche après marche, Bouna fait le job, de mieux en mieux. La semaine dernière, il livre même une très bonne performance face à Salzbourg et se révèle aux yeux des observateurs comme une très belle alternative. Parmi eux, le directeur sportif du FC Metz Philippe Gaillot, à l'origine de sa venue au centre de formation lorrain : "J'avoue que j'étais un peu surpris, car Bouna a toujours eu une vraie vocation offensive. Chez nous, il a débuté meneur de jeu chez les jeunes, puis on l'a mis en percussion sur le côté. Je me souviens qu'avec le coach Albert Cartier on a dû le faire beaucoup travailler pour qu'il apprenne à défendre et à se replacer, car il n'avait pas les bases. On a d'ailleurs vu ses progrès à ce niveau-là lors de sa dernière saison chez nous, avant qu'il parte à l'OM. Mais de là à penser qu'il devienne défenseur latéral, c'était difficile à imaginer". D'où sa surprise dimanche soir devant sa télé face à la grande performance de son ancien protégé dans le couloir droit : "Il a été très bon contre St-Etienne, offensivement et défensivement. Il a bien compris comment couvrir l'axe quand le jeu est de l'autre côté et suppléer les centraux. C'est ce qu'il y a de plus difficile à assimiler quand on n'est pas défenseur de formation, et visiblement, il a bien pigé ça".
Surpris par cette reconversion, le dirigeant messin ne l'est pas quant à la faculté de Bouna à s'accrocher. Si personne ne le voyait réussir à l'OM, lui savait que le garçon n'était pas du genre à baisser les bras : "Ce qui m'a frappé chez lui quand il était chez nous, c'est qu'il a toujours été à l'écoute. Il a une énorme envie de réussir, et quand on lui demande quelque chose il est capable de s'y mettre à fond. Il est discret, mais très déterminé". Cette détermination et ses qualités naturelles ont fait le reste : "C'est un joueur qui est très bon lorsqu'il a le jeu devant lui, d'où sa réussite à ce poste. C'était l'un de ses soucis lorsqu'il jouait plus haut, car il avait du mal à se retrouver dos au but. Là, c'est intéressant pour lui parce qu'il a une grosse capacité à prendre la profondeur dans le couloir avec son gros volume de jeu et sa capacité à répéter les courses. Il va très vite et a une bonne reprise d'appuis, ce qui lui permet de réagir face à un attaquant rapide".
Lui aussi ancien attaquant reconverti, Philippe Gaillot va maintenant suivre les aventures de son poulain à l'OM avec beaucoup de confiance. Pour lui, l'OM et Rudi Garcia disposent désormais d'un titulaire potentiel en puissance, et surtout d'un précieux couteau suisse : "Je ne sais pas s'il s'est définitivement reconverti, mais ce qui est certain, c'est qu'il s'ouvre de très belles perspectives de carrière à l'OM, ce qui n'était pas gagné au poste de milieu offensif. Pour moi, avec ce que j'ai vu face à St-Etienne, il peut représenter une vraie concurrence face à Sakai. Avec sa polyvalence, il offre de belles solutions à Rudi Garcia". Au vu du calendrier à venir, cette résurrection de Bouna Sarr tombe du ciel, et personne ne s'en plaindra !
Camille Daurès