Affaire Payet : à qui profite le crime ?
Par la rédaction du Phocéen
Publié le 10/04/2015 à 10:45
La décision est tombée tard jeudi soir, à quelques minutes du bouclage des journaux papier, Dimitri Payet a écopé de deux matchs ferme de suspension pour ses propos dans les couloirs du Vélodrome après OM-Lyon (0-0). L'arbitre principal n'avait rien vu, rien entendu. Normal, il était encore sur le rectangle vert. Payet a exprimé sa colère. Légitime, évidemment, car le ballon était notamment bien entré dans le but de Lopes, rappelons-le, cela ne fait jamais de mal. Jusque-là, rien de neuf dans les couloirs d'un stade, des joueurs qui hurlent, s'engueulent et braillent des insanités, ça a toujours existé, et ça se produit chaque semaine, de Nantes à Metz et de Lille à Marseille.
Non, là, ce qui choque, c'est que de rapport de l'arbitre, il n'y eut point. Il a fallu attendre vingt-quatre heures, et la diffusion des images dans l'émission J+1 de Canal+ Sport. Les micros toujours bien tendus pour comprendre de l'intérieur les joueurs et les coachs, c'est le principe même de l'émission, qui connait d'ailleurs un franc succès. On peut néanmoins s'interroger sur le bien-fondé de montrer ces images, qu'est ce que cela apporte de plus ? Il y a les pour et les contre, comme toujours. Frédéric Thiriez, président de la LFP, est, lui, plutôt du côté des désapprobateurs. Quand la caméra de la chaine cryptée capte et diffuse ce moment où il murmure à l'oreille de Nasser Al-Khelaifi (président du Paris SG) "I'm really sorry for this terrible arbitrage" (Je suis vraiment désolé de ce très mauvais arbitrage) alors que l'arbitre a exclu Cavani durant la partie pour l'avoir touché, le président à la moustache crie au complot et envisage, un temps, de stopper les caméras trop intrusives aux abords de la pelouse. Il n'en sera finalement rien, et cette déférence hâtive aux yeux de tous, envers le club le plus riche de France, fait tache. Thiriez fera finalement la même chose, plus tard, sans les caméras cette fois, avec Martel (président de Lens), histoire d'équilibrer la balance. Mais les images restent.
Et aujourd'hui, ses paroles résonnent encore. Thiriez s'excuse auprès de certains, les arbitres se trompent toujours autant, et le feront encore, ils ne sont que des humains après tout. Et le dindon de la farce, c'est l'OM. Finalement, c'est ça, à ce jour, qui rend malade les supporters et forgent les crispations. Le club phocéen s'est vu refuser un but valable et, en plus, perd pour deux matchs son meneur de jeu. Double sanction. Sentiment de frustration décuplé. Incompréhension totale de la part des aficionados. La pilule ne passe pas. Et si on ajoute à cela la mise en instruction par la commission de discipline du "dossier OM-PSG" concernant le comportement des supporters marseillais, c'est l'écoeurement. La tristesse même d'en arriver à de telles extrémités. Un tifo géant, l'un des plus beaux au monde, une ambiance de folie, un match spectaculaire, des audiences rarement égalées, un emballement médiatique extrême... et la LFP va convoquer les dirigeants marseillais pour quelques fumigènes et jet de papiers sur la pelouse. À tirer indéfiniment sur la corde, elle cassera un jour. Le ras de bol est déjà généralisé.
Quant à la sanction de Payet en elle-même (deux matchs ferme), si on la compare à celle de Zlatan Ibrahimovic (quatre matchs ferme), encore une fois, cela parait disproportionné, tant les propos du second paraissent bien plus honteux. Mais il y a un barème de sanctions à la LFP, nous dit-on, et les sanctions prononcées jeudi soir n'en sont que l'application. Passons alors. Ou plutôt, non. Attardons-nous aussi sur le contexte des auditions. Payet était présent pour se défendre, avec l'avocat du club et Vincent Labrune. L'OM n'a fait qu'un avec son joueur, contre vent et marée. En face, Ibrahimovic a brillé par son absence et Al-Khekaifi n'était pas là non plus. Un joli pied de nez à la commission en somme. De toute façon, cette dernière a simplement appliqué son barème, alors, le reste, ce n'était que poésie...
Maintenant, l'OM et tout ce qui touche de près ou de loin au club sont prévenus. Plus rien ne sera oublié, tout sera étudié, dans le moindre détail, car rue Léo Delibes à Paris, ça ressemble aussi à une certaine lutte de pouvoir. D'autres dossiers, concernant les arbitres et leurs décisions, mériteraient aussi d'être ouverts. Mais il n'en est rien, et il n'en sera jamais rien. Et comme à chaque fois que l'incompréhension prédomine, la même ritournelle revient en boucle : 'mais à qui profite le crime ?' Chacun aura sa réponse et ses arguments. Le constat d'un dysfonctionnement profond est posé et personne ne semble vouloir y remédier, c'est peut-être ça le plus grave après tout.