Régulièrement égratigné depuis son arrivée à l'OM, Marcelo Bielsa avait pu faire taire, ou du moins atténuer les critiques, lorsque son OM surfait en tête de la Ligue 1 et battait tous les records en terme de spectacle. En Angleterre, en Espagne ou en Italie, des dossiers entiers lui étaient consacrés, dans ces pays où l'on ne suit que de très loin le championnat français habituellement. Mais la série noire entamée début 2015 a fait son oeuvre, et les quatre défaites d'affilée de ce mois d'avril ont définitivement ébranlé l'édifice. Les spécialistes ont ressorti les cisailles et s'en donnent à coeur joie.
Tous ? Non. Curieusement, on trouve un Daniel Riolo, classé pourtant pro-parisien, pour se mettre en travers de la route. Il y a aussi, et surtout, un amoureux historique du football sud-américain, vieux routier des médias et grand idéaliste du football romantique. Souvent raillé pour ses commentaires "roots" et ses maillots à l'envers, portés dans des vidéos-coups de gueule faites-maison, Didier Roustan est un fan de la première heure du Loco, bien avant que son nom n'ait franchi les frontières de l'Argentine. Pour Le Phocéen, il revient sur l'offensive anti-Bielsa de ces derniers jours. Interview :
- Didier, tes dernières vidéos sur L'Equipe.fr sont de véritables plaidoyers pro-Bielsa. Pourquoi ?
"Déjà, je trouve que la presse a été très dure avec Bielsa, et cela a mis le bordel dans la tête des joueurs. Déjà qu'ils se plaignaient des schémas de jeu, qu'ils travaillaient trop, en voyant que les spécialistes s'acharnaient sur lui, cela a dû les conforter à ce niveau-là".
- On a le droit d'aimer ou pas, non ?
"Bien sûr. Personnellement, je suis fan car je le suis depuis longtemps et j'aime son côté atypique. Il pratique un football spectacle qui ne peut que plaire aux supporters marseillais, et pas forcément suicidaire comme beaucoup le disent en ce moment. Ce n'est pas lui qui aligne les erreurs individuelles face à Lorient ! Je trouve dégueulasse de s'acharner contre cet entraîneur intègre, qui est une référence pour les plus grands. Il faut se souvenir de ce que disait de lui Ferguson après avoir été éliminé par Bilbao en coupe d'Europe, ou de ce que disait Cruyff pour son jeu avec le Chili, sans parler de Guardiola."
- On peut comprendre les critiques, vu les résultats récents ?
"Oui, mais aujourd'hui, tu entends des mecs qui n'ont jamais rien fait dans le football s'en prendre à lui. En plus, c'est une proie facile car il est très correct et il ne répond jamais. Un minimum de respect, quoi ! Il ne sont jamais allé au Chili, pour eux, le Chili n'existe pas sur leur carte du football. Mais si tu vas là-bas, ou en Argentine, le football, c'est sérieux, c'est pointu. Ils sont grotesques".
- Pourquoi cet acharnement, alors ?
"C'est peut-être du copinage pour se protéger entre entraîneurs français. c'est sûr que Bielsa, il n'a pas la carte, hein ! Ils ont cassé Ancelotti, ils se sont foutus de Jardim, je trouve ça démesuré et ridicule. Ok, il a peut-être commis des erreurs, mais parler d'imposture, c'est ridicule !".
- Tu le vois rester ?
"Même s'il ne pleurniche pas, il doit quand même être au courant de ce qui se dit sur lui. Il est possible aussi qu'il soit déçu par l'attitude de ses joueurs. Il n'est pas là pour rigoler, il est là pour bosser, et il faudra vraiment qu'il ait des garanties. Qu'il puisse prendre cinq ou six mecs pour bosser sérieusement. Je croise les doigts, car c'est une chance inouïe d'avoir Bielsa en Ligue 1, mais je ne suis pas très optimiste".