Parce qu'il y en a assez de voir les adversaires de l'OM évoluer en blanc au Vélodrome. Plaidoyer.
Il est difficile de se passionner pour un match de football sans prendre parti pour l'une des deux équipes engagées. Dans ce sport, il est avant tout question de camp, et donc de couleurs. Les bleus contre les rouges, comme au baby-foot. Pour l'anecdote, son inventeur avait choisi ces couleurs en pensant aux clubs d'Alès et de Nîmes. En poussant un peu plus loin, il aurait pu peindre ses demis en blanc pour représenter Marseille. Mais cela n'aurait peut-être pas suffi pour que les générations futures perçoivent le clin d’œil. Car pour représenter l'OM, une couleur ne suffit plus. Il faut désormais du bleu, du blanc, de l’orange, du noir, du rose...
Plus grand pourvoyeur de maillot en France, le club marseillais est au centre de la stratégie marketing d'Adidas pour le football. Depuis dix ans, les tenues du club évoluent, pas forcément dans le sens des traditions, faisant de l'équipe une cible facile pour les moqueurs. Il y a eu l'épisode du maillot Europe alors que l'OM n'avait que le championnat à jouer en 2004. Sur la tunique extérieure de cette année se trouve un col tricolore, réservé d'ordinaire au champion sortant, pas au dixième du dernier exercice. Mais la vraie barrière, celle qui fait basculer du détail au choquant, a été franchie avec la réception de l'OL, où ce sont les visiteurs qui ont joué en blanc alors que l'OM étrennait son quatrième maillot.
Soyons clairs, l'intention des dirigeants marseillais est plus que louable. Derrière ce maillot noir et rose, il y a une opération destinée à aider la lutte contre le cancer. Et pour que cela ait le plus large écho possible, il faut évidemment l'exposer lors des grandes affiches. C'est cependant la fois de trop. Car l'OM joue déjà en noir en coupe d'Europe, laissant "ses" couleurs à Mönchengladbach et Fenerbahçe, comme à Bolton, au Real Madrid, à Milan ou au Zénith St Petersbourg par le passé. "Ce qui dérange les supporters, c'est quand on joue à domicile et qu'ils voient l'adversaire jouer en blanc" enfonce Christophe Champy sur le plateau du Talk Show (voir la vidéo). "Moi j'ai grandi avec le maillot Panasonic, Maison Bouyges, poursuit le rappeur Alonzo. Je veux le maillot blanc avec les bandes bleues, c'est nos couleurs."
La requête ne semble pas folle. Elle n'émane surtout pas de fans fermés sur eux-mêmes. Les chiffres des ventes le prouvent, les supporters jouent le jeu du progrès. Comment ne pas être fier d'un maillot orange réversible, lorsqu'on sait ce que cela représente, dans l'histoire des virages, mais aussi de la ville, tout simplement. "J'ai chez moi le maillot du centenaire qui est or, avoue Tony Selliez. Mais on devrait jouer en blanc à domicile".
On y revient donc. Afficher ses couleurs à domicile. Comme le Real Madrid, le Milan AC, autres poules aux oeufs d'or de la marque aux trois bandes, qui n'affichent ses nouveautés qu'à l'extérieur. "C'est comme dans n'importe quelle négociation, explique Hervé Bercane. Soit tu t'écrases devant l'équipementier qui décide à quel match tu porteras tel ou tel maillot, soit tu te bats. À Manchester United, tu ne fais pas n'importe quoi avec les maillots."
Une attitude à adopter d'urgence donc, car elle ne fait pas fuir pour autant les annonceurs, toujours friands pour associer leur nom à des valeurs fortes. Le nouveau partenariat record du FC Barcelone le prouve. Et ça ne les empêche pas de faire admirer chaque année, leur tenue avant-gardiste sur toutes les pelouses d'Europe.